Séminaire d’Aurélie Khimoun

« Vulnérabilite des espèces face à la fragmentation des habitats et influence du paysage sur la connectivité des populations » – Aurélie Khimoun, université de Bourgogne – vendredi 10 novembre 2017 à 11h, amphi Monge

La fragmentation des habitats est une des principales menaces pour la biodiversité. Ainsi, i) prédire la réponse des espèces à la fragmentation et ii) comprendre comment les modifications du paysage influencent la connectivité des populations constituent des enjeux importants en biologie de la conservation. Par une approche comparative sur huit espèces d’oiseaux, coexistant dans le même paysage fragmenté de la Guadeloupe, nous avons testé le lien entre spécialisation d’habitat et sensibilité à la fragmentation forestière. Pour chaque espèce, nous avons quantifié les niveaux relatifs de spécialisation forestière et de différentiation génétique entre les populations. Nos résultats démontrent de manière empirique et à petite échelle spatiale que les espèces spécialistes de la forêt sont plus sensibles à la fragmentation que les espèces généralistes et que la spécialisation d’habitat constitue un bon prédicteur des conséquences génétiques de la fragmentation. Par une approche de génétique du paysage, nous avons testé le rôle relatif de plusieurs traits naturels ou anthropiques du paysage (altitude, routes, occupation des sols), dans la différenciation génétique d’une espèce spécialiste de l’habitat forestier, la Paruline caféiette (Setophaga plumbea) en Guadeloupe. Dans ce cadre, nous avons optimisé des surfaces de résistance sans a priori en utilisant deux types de distances écologiques : la distance de moindre cout (LCP) et la distance de résistance (IBR). Nous avons détecté une réduction du flux de gènes à petite échelle spatiale, principalement induite par le type d’occupation du sol, avec un impact négatif de la matrice non-forestière sur la connectivité fonctionnelle du paysage. Toutefois, les différentes composantes de la matrice paysagère n’affectent pas la connectivité des populations de la même manière et leur conductivité augmente avec leur similarité structurelle par rapport à l’habitat forestier : les surfaces ouvertes, telles que les zones urbaines et les prairies, sont associées aux plus fortes valeurs de résistance, alors que les surfaces agricoles présentent des valeurs de résistance intermédiaires. Nos résultats ont révélé une meilleure performance de IBR comparé à LPC pour expliquer les flux de gènes, ceci reflétant des mouvements de dispersion sub-optimaux au travers de ce paysage anthropisé. Ce dernier résultat remet en question l’utilisation courante des LCP pour définir les corridors d’habitat et plaide pour une plus large utilisation de la modélisation issue de la théorie des circuits dans ce contexte.